Nombre d’entre vous l’ont remarqué : le stoïcisme et le bouddhisme présentent d’apparentes similitudes, en particulier dans la pratique d’exercices spirituels. Visant à la maîtrise de soi, ces exercices reposent sur la concentration mentale, le retour sur soi (comme l’examen de conscience, la médiation sur l’impermanence, sur le non-attachement…).

D’autres sont doctrinales, comme les notions d’impermanence et d’interdépendance, ou les notions de Logos et de Dharma, en particulier dans leur vision de la Nature. Eudémonistes, ils proposent tous deux une voie vers la sagesse par l’usage des vertus et l’éradication de l’ignorance. Leur éthique est pragmatique, intentionnaliste et casuiste1.

Il faut toutefois se garder d’une interprétation à l’aune de catégories bien occidentales (héritées en particulier d’Aristote) qui ne sont pas applicables aux philosophies orientales2, au point que le regard occidental fit parfois du bouddhisme une philosophie nihiliste et pessimiste. Tout aussi erroné serait de réduire ces deux philosophies à des déclinaisons proches d’une manière d’envisager et de répondre aux grandes questions et vicissitudes de l’existence, les choses sont bien plus subtiles. Il n’y a historiquement aucune parenté entre le bouddhisme et le stoïcisme et rien ne prouve que le premier ait pu influencer le second. Le bouddhisme se distingue par sa dimension sotériologique3, l’Éveil, au-delà de toute expression conceptuelle, dimension qui n’appartient pas au stoïcisme, et il y a bien d’autres points de divergence.

Nous pouvons néanmoins nous interroger sur ce qui pourrait expliquer ces similitudes parfois troublantes. Un élément de réponse tient dans l‘universalité des grandes questions philosophiques posées de tous temps à toute l’humanité, mais aussi des situations concrètes du quotidien. Il semble alors naturel d’y apporter des réponses tout aussi universelles qui seront pour une bonne part convergentes4.

Doué d’une remarquable capacité de diffusion, le bouddhisme progresse en Occident sous des formes nouvelles, comme le bouddhisme socialement engagé. Parallèlement, des formes actualisées du stoïcisme ont cours dans les pays anglophones. La diffusion d’un stoïcisme contemporain dans les pays francophones est plus laborieuse, en raison entre autres de réticences des milieux académiques. Néanmoins, sous leurs formes actuelles, stoïcisme et bouddhisme se présentent comme des forces de proposition face aux nouveaux défis de l’humanité, dans l’esprit du convivialisme5.

Pour en savoir plus sur les liens entre stoïcisme et bouddhisme, n’hésitez pas à consulter ma thèse, dont le tome 1 et le tome 2 sont parus aux Éditions universitaires européennes en 2016, sous le titre Stoïcisme et bouddhisme: Une réflexion comparative des origines à nos jours., ainsi que les deux articles cités en notes de bas de page, « Stoïcisme et bouddhisme, questions d’éthique » d’une part, et « Stoïcisme et bouddhisme, la question du suicide » d’autre part.


1 Pour approfondir similitudes et différences entre stoïcisme et bouddhisme d’un point de vue éthique, je vous invite à consulter l’article « Stoïcisme et bouddhisme, questions d’éthique », disponible en suivant ce lien.

2 Qualifier le bouddhisme de religion est l’un de ces biais d’interprétation.

3 Qui se rapporte à une doctrine du salut.

4 Pour un exemple concret, concernant le suicide, et leur appréhension respective dans le stoïcisme et le bouddhisme, je vous invite à consulter l’article « Stoïcisme et bouddhisme, la question du suicide », disponible en suivant ce lien.

5 Selon les travaux de Marcel Mauss, le convivialisme est une réponse à la question : comment vivre ensemble en s’opposant sans se massacrer ? C’est une question préalable, centrale dans toutes les sociétés humaines et indispensable à poser avant celle de savoir quel serait le bon régime politique, où chacun peut avoir ses préférences.


Crédits photo: Photo by Matteo Di Iorio on Unsplash.

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