Améliorez-vous chaque jour avec le stoïcisme

Tout au long de l’été, Yannick Berthoud, membre de Stoa Gallica, partage sur ce blog sa vision du stoïcisme à travers une série d’articles-témoignages. Cette série d’articles inaugure un nouveau format sur le blog de Stoa Gallica. Par le témoignage très personnel d’une personne qui pratique le stoïcisme, il s’agit de montrer les différentes manières, très concrètes, de se réapproprier le stoïcisme aujourd’hui, au quotidien. Bonne lecture, et bon été!

Maël Goarzin


Si vous deviez définir un domaine dans lequel il est certain que la perfection n’existe pas, celui de votre comportement devrait probablement figurer en tête de liste.

Chaque jour est un nouveau défi pour parler et agir vertueusement en toute circonstance. Observez votre comportement, votre humeur et votre état d’esprit.

L’homme qui vous coupe la route aujourd’hui fait naître en vous un sentiment de colère que vous n’auriez pas eu la veille. L’augmentation de votre collègue éveille de la jalousie aujourd’hui et de la fierté bienveillante le lendemain.

Préparez-vous au défi du quotidien

Bien que le stoïcisme soit une pratique personnelle, elle est tournée vers l’humanité, Marc Aurèle le dit ainsi :

Mets-toi d’accord avec les choses auxquelles le sort t’a lié ; aime les hommes que le sort te donne pour compagnons, mais que ce soit du fond du cœur !

Marc Aurèle, Pensées, VI, 39

Vous n’êtes jamais plus malheureux que lorsqu’il y a un malentendu avec un être aimé. Jamais plus en deuil que dans l’adversité avec un ami, un parent ou un collègue.

Chez les êtres raisonnables, on observe des républiques, des amitiés, des familles, des réunions, et, en cas de guerre, des traités et des trêves.

Marc Aurèle, Pensées, IX, 9

Aussi, l’empereur Marc Aurèle se préparait chaque matin aux comportements des uns et des autres:

Dès l’aurore, dis-toi par avance : “Je rencontrerai un indiscret, un ingrat, un insolent, un fourbe, un envieux, un insociable. Tous ces défauts sont arrivés à ces hommes par leur ignorance des biens et des maux. Pour moi, ayant jugé que la nature du bien est le beau, que celle du mal est le laid, et que la nature du coupable lui-même est d’être mon parent, non par la communauté du sang ou d’une même semence, mais par celle de l’intelligence et d’une même parcelle de la divinité, je ne puis éprouver du dommage de la part d’aucun d’eux, car aucun d’eux ne peut me couvrir de laideur. Je ne puis pas non plus m’irriter contre un parent, ni le prendre en haine, car nous sommes nés pour coopérer, comme les pieds, les mains, les paupières, les deux rangées de dents, celle d’en haut et celle d’en bas. Se comporter en adversaire les uns des autres est donc contre nature, et c’est agir en adversaire que de témoigner de l’animosité et de l’aversion.”

Marc Aurèle, Pensées, II, I

Il n’est pas question d’apprendre par cœur sa méditation. Dans ma propre pratique, je l’ai adaptée selon les défauts qui ont un impact sur moi et je me permets de me visualiser agir avec bienveillance.

Dans votre pratique, vous pouvez également vous souvenir de vos propres défauts et faire preuve de bienveillance envers vous-même.

Le stoïcien n’est pas stoïque. Il n’est pas impassible aux événements mais il ne se laisse pas être submergé par ses émotions. Ce qu’il traverse, il l’aura peut-être même « déjà vécu » grâce à l’exercice de préméditation des maux. De ce fait, il lui est plus facile de gérer ses émotions.

Il n’arrive à personne rien qu’il ne soit naturellement à même de supporter. Les mêmes accidents arrivent à un autre et, soit qu’il ignore qu’ils sont arrivés, soit étalage de magnanimité, il reste calme et demeure indompté. Etrange chose, que l’ignorance et la suffisance soient plus fortes que la sagesse !

Marc Aurèle, Pensées, V, 18

Quant à mon jugement sur les événements, si je ne fais pas la distinction entre ce qui dépend de moi et ce qui ne dépend pas de moi, si je n’ai pas conscience que les événements ne sont ni des biens, ni des maux, mais des indifférents préférables ou non, je risque d’être submergé. L’exercice de préméditation des maux est un exercice de visualisation des indifférents non préférables que je pourrais rencontrer dans la journée et il me prépare précisément à ne pas considérer ces indifférents non préférables comme des maux, mais comme des indifférents préférables. Ainsi, lorsque ces événements arrivent, je peux poser un jugement adéquat sur ces événements et ne pas être troublé.

Vivez avec les événements pour ce qu’ils sont

Reprenez les exemples du début :

L’homme qui vous coupe la route aujourd’hui fait naître en vous un sentiment de colère que vous n’auriez pas eu la veille.

Qu’est-ce que cela vous apprend ?

Ce qui trouble les hommes, ce ne sont pas les choses, ce sont les jugements qu’ils portent sur les choses. […] Ainsi donc quand nous sommes contrariés, troublés ou peinés, n’en accusons jamais d’autres que nous-même, c’est à dire nos propres jugements. Il est d’un ignorant de s’en prendre à d’autres de ses malheurs ; il est d’un homme qui commence à s’instruire de s’en prendre à lui-même ; il est d’un homme complètement instruit de ne s’en prendre ni à un autre ni à lui-même.

Epictète, Manuel, 5

Faites preuves de bienveillance autant envers vous qu’envers les autres. Cela ne signifie pas qu’il faille tout laisser passer. Montrez-vous ferme lorsque cela est nécessaire, sans oublier de vous mettre à sa place :

Lorsqu’un homme a commis une faute contre toi, considère aussitôt quelle opinion il se fait du bien ou du mal pour avoir commis cette faute. Lorsque tu le sauras, en effet, tu auras pitié de lui, et tu n’éprouveras ni étonnement ni colère. Car, ou bien, toi aussi, tu te fais encore la même opinion que lui sur le bien, ou une autre analogue, et il faut donc lui pardonner. Mais si tu ne partages plus ses opinions sur le bien et le mal, tu seras plus facilement bienveillant à celui qui les distingue mal.

Marc Aurèle, Pensées, V, 26

Parmi les nombreux exercices stoïciens, Marc Aurèle pratiquait le regard d’en haut. C’est une méditation qui a de nombreuses vertus, dont celle de prendre du recul à la fois sur les événements, mais aussi sur le fait que l’on n’est ni meilleur, ni pire que son prochain :

L’Asie, l’Europe, des coins du monde ; tout océan, une goutte d’eau dans le monde ; l’Athos, une motte du monde ; le temps présent tout entier, un point de la durée. Tout est petit, inconsistant, en évanescence ! Tout provient de là-haut, directement mû par ce commun principe directeur, ou indirectement, par voie de conséquence. Ainsi donc, même la gueule du lion, même le poisson, et enfin tout ce qu’il y a de nocif, comme l’épine, comme la fange, sont des conséquences de tout ce qu’il y a là-haut de vénérable et de beau. Ne t’imagine donc pas que tout cela soit étranger au principe que tu révères ; mais réfléchis à la source d’où procèdent les choses.

Marc Aurèle, Pensées, VI, 36

Vous pouvez choisir de vous visualiser au-dessus de votre corps, votre immeuble, votre quartier et monter toujours plus haut. Vous pouvez le faire en étant dans une méditation calme et profonde ou au contraire vous souvenir de l’infinité des choses et de notre état dans ce grand univers.

Agissez pour le bien commun

“Puisqu’il m’a fait du mal, je lui en fais aussi”.

À la lumière de cet article, n’est-ce pas la formule d’un fou qui se laisse à la fois submerger par ses opinions et ses émotions ? Chaque cause entraîne des conséquences. Chacune des conséquences est une cause vers d’autres conséquences.

Il est du devoir de chacun d’agir conformément au bien commun :

À chaque action demande-toi : de quelle façon me convient-elle ? N’aurai-je pas à m’en repentir ? Encore un peu, et je suis mort et tout a disparu. Que rechercher de plus, si l’action, que présentement j’accomplis, est celle d’un homme intelligent, sociable et soumis à la même loi que Dieu ?

Marc Aurèle, Pensées, VIII, 2

Souvenez-vous que nous sommes faits pour collaborer :

Ce qui n’est pas utile à l’essaim n’est pas utile à l’abeille non plus.

Marc Aurèle, Pensées, VI, 54

De ce fait, demandez-vous toujours comment votre action et vos paroles vont influencer les événements.

Examinez-vous

En quoi votre propre comportement a amené tel ou tel événement ? Qu’est-ce qui chez vous, amène l’autre à agir ainsi avec vous ?

Prends l’habitude, à toute action, si possible, que tu vois faire à quelqu’un, de te demander en toi-même : « Cet homme, à quel but rapporte-t-il cette action ? » Commence par toi-même et sois le premier que tu examines.

Marc Aurèle, Pensées, X, 37

L’examen de conscience est destiné à vous améliorer. Il peut venir de vous, comme on vient de le voir, mais également des autres :

Si quelqu’un peut me convaincre et me prouver que je pense ou que j’agis mal, je serai heureux de me corriger. Car je cherche la vérité, qui n’a jamais porté dommage à personne. Mais il se nuit celui qui persiste en son erreur et en son ignorance.

Marc Aurèle, Pensées, VI, 22

Personnellement, je le pratique le plus souvent possible, et de toute façon une fois le soir en revisualisant mes comportements de la journée.

Souvenez-vous en

S’améliorer est un travail du quotidien, une tâche difficile qui demande de la discipline mais qui est accessible à tous.

Ne suppose pas, si quelque chose t’est difficile que cette chose soit impossible à l’homme. Mais, si une chose est possible et naturelle à l’homme, pense qu’elle est aussi à ta portée.

Marc Aurèle, Pensées, VI, 19

Crédits: Photo de Marcel Ardivan sur Unsplash

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