Comme l’a écrit Pierre Hadot dans l’avant-propos de son ouvrage Introduction aux Pensées de Marc Aurèle, bien que presque deux mille ans se soient écoulés, les Pensées de Marc Aurèle restent toujours vivantes et sont encore lues aujourd’hui par de très nombreuses personnes à travers le Monde.
On pourrait en déduire que leur lecture ne présente pas de difficultés particulières, et que chacune et chacun d’entre nous peut y trouver une formule qui lui parlera sur le moment, qui semblera apporter un éclairage nouveau sur une situation vécue et convenir à notre état d’âme du moment.
Cela en constitue pourtant une lecture superficielle qui n’est pas en mesure d’appréhender et d’atteindre la substantifique moelle que constitue en réalité le contenu de ces Pensées. Beaucoup se sont en effet interrogés sur la nature exacte de cet étrange ouvrage et sur l’objectif visé par Marc Aurèle s’écrivant à lui-même.
Selon Pierre Hadot, Marc Aurèle n’écrivait que pour se remémorer les principes de la philosophie stoïcienne, pour envisager au travers de ceux-ci les événements auxquels il devait faire face quotidiennement, avec pour visée pratique de se comporter de manière appropriée et d’adopter des règles de vie cohérentes avec ces principes.
Ce faisant, Marc Aurèle semble avoir suivi un conseil d’Epictète, qui nous a été préservé dans les Entretiens compilés par Arrien. Ainsi, on peut lire au Livre III, Chapitre 24, repère 103 :
« Ces principes, il faut que tu les aies sous la main, la nuit et le jour, il faut les écrire, il faut les lire. »
Et également au Livre I, Chapitre1, repère 25 :
« Voilà ce que doivent méditer les philosophes, voilà ce qu’ils doivent écrire tous les jours, qui doit être leur matière d’exercice. »
C’est donc logiquement que nous pouvons trouver au Livre VII, 2 ce que Marc Aurèle écrit pour lui-même :
« Les principes vivent. Comment pourraient-ils mourir, à moins que les idées qui leur correspondent ne s’éteignent ? Or celles-ci, il dépend de toi de les raviver sans cesse. »
Aussi, au travers des épisodes à venir de cette série intitulée « Pensées Décomposées », je me propose d’analyser une sélection de Pensées de Marc Aurèle, et d’en décomposer le contenu pour remonter aux principes de la philosophie stoïcienne sur lesquels reposent leur élaboration.
En ce qui concerne les citations qui seront analysées, je n’avais pas retenu initialement d’édition particulière des Pensées, chacune des traductions dont je disposais ayant leurs points forts et leurs points faibles. Je comptais me reposer sur les différentes éditions à ma disposition, ainsi que sur la traduction révisée par Pierre Hadot de certains passages des Pensées présentés dans l’ouvrage Introduction aux Pensées de Marc Aurèle, et ce afin de constituer, finalement, une version faisant sens pour moi et cohérente avec les principes de la philosophie stoïcienne.
Mais récemment j’ai acquis une nouvelle version des Pensées de Marc Aurèle aux éditions Vrin, dont la traduction a été assurée par Robert Muller. Ayant apprécié sa précédente traduction des Entretiens d’Epictète, et connaissant sa rigueur et sa qualité de traducteur, notamment en regard de l’utilisation du vocabulaire technique des stoïciens, j’ai décidé d’utiliser cette traduction comme référence pour la réalisation de cette série de vidéos.
A bientôt donc pour découvrir le premier épisode de la série « Pensées Décomposées ».