Ce texte est une traduction en français, par Michel Rayot et Maël Goarzin, de l’article de Kai Whiting et Santara Gonzales, “The Power of Circles of Concern“, paru au mois de décembre 2021 dans le magazine The Stoic, dirigé par Chuck Chakrapani. Nous remercions l’éditeur de The Stoic de nous avoir donné l’autorisation de traduire ce texte et de le publier ici.
Kai Whiting est co-auteur de Being Better : Stoicism for a World Worth Living In. Il est chercheur et chargé de cours en développement durable et stoïcisme à l’UC Louvain, en Belgique.
Santara Gonzales est la Présidente et co-fondatrice de Wisdom Unlocked, une organisation à but non lucratif qui utilise les principes stoïciens pour aider des personnes à garder de bonnes dispositions dans les circonstances difficiles.
Le pouvoir des cercles de Hiéroclès
par Kai Whiting et Santara Gonzales
« Les cercles de Hiéroclès nous rappellent le pouvoir conféré par le fait d’embrasser toute l’humanité et la planète entière pour le bien de tous, y compris le nôtre. »
Les cercles de Hiéroclès
Le philosophe stoïcien Hiéroclès a développé le concept de cercles concentriques qui dérive du principe stoïcien de cosmopolitisme[1]. Ce dernier souligne que nous faisons tous partie d’une communauté mondiale enracinée dans la raison (logos). Les cercles concentriques de Hiéroclès illustrent les diverses relations que nous avons avec nos semblables, y compris celles que nous avons avec nous-mêmes, et celles que nous avons avec notre famille immédiate, nos amis et le reste de l’humanité.
Hiéroclès défend l’idée que nous devrions resserrer chacun des cercles de nos relations, pour finalement rapprocher la communauté mondiale de notre premier cercle (le soi), afin que nous puissions nous reconnaître dans les autres, et reconnaître les autres en nous. Cela implique souvent un ajustement de notre façon de penser, car cela nous encourage à ouvrir notre vie aux autres. Cela devrait aussi nous amener à traiter les autres avec équité et respect, en gardant à l’esprit que nous partageons tous la capacité de raisonner. En retour, cela nous oblige à reconnaître nos obligations envers ceux que nous pourrions ne pas aimer ou avec lesquels nous serions en désaccord.
Cependant, cela ne signifie pas que nous devrions traiter un étranger comme nous le traitons habituellement nos frères et sœurs, nos parents et amis. Hiéroclès a écrit lui-même que ce serait : « … de la folie… de vouloir nous lier à ceux qui ne portent aucune affection envers nous… [tout en] … négligeant ceux qui nous sont proches et ceux dont la nature nous a pourvus. »¹
Les cercles de Hiéroclès sont dynamiques
Il est à noter que les cercles de nos relations sont dynamiques et non statiques, et que les individus de ces cercles peuvent changer au fil du temps, en fonction de nos rôles dans la société. Par exemple, un étranger pourrait devenir un ami, et un collègue pourrait devenir un conjoint. L’important n’est pas l’étiquette que nous attribuons aux autres, mais la façon dont nous les intégrons dans nos cercles. Il est pertinent de prendre soin de soi-même, afin de pouvoir prendre soin des autres et de notre planète. Nous n’avons pas le luxe d’adopter une approche « loin des yeux, loin du cœur », car cela va à l’encontre du principe de cosmopolitisme.
Nous sommes plus interconnectés que jamais
Dans le monde d’aujourd’hui, nous sommes plus interconnectés que jamais, mais, à certains égards, nous sommes aussi davantage séparés. Le principe sous-tendu par les cercles de Hiéroclès nous incite à prendre en compte ceux auxquels nous ne pensons guère habituellement, y compris ceux qui sont incarcérés, sans abris, ou ceux qui se trouvent à l’autre bout du monde, que nous ne rencontrerons peut-être jamais. Le resserrement de nos cercles de relations permet aussi le rapprochement, le dialogue constructif et la recherche d’un terrain d’entente, avec ceux qui ne nous ont peut-être pas traités comme nous l’aurions souhaité et ceux que nous avons nous-mêmes délaissés.
Le pouvoir d’embrasser l’humanité
En résumé, les cercles de Hiéroclès nous rappellent le pouvoir conféré par le fait d’embrasser toute l’humanité et la planète entière pour le bien de tous, y compris le nôtre. Ils nous aident à renforcer l’idée que la capacité de raison comble le fossé entre les autres et nous-mêmes.
[1] Hierocles the Stoic: Elements of Ethics, Fragments, and Excerpts. Edité par Ilaria Ramelli. Traduit par Ilaria Ramelli et David Konstan. Atlanta : Société de littérature biblique, 2009.
Crédits: Photo by Aarón Blanco Tejedor on Unsplash.
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